05 août 2009

Là-Haut, au sommet.

Là-haut, film américain de Pete Docter et Bob Peterson.
1h44. Sortie le 29 juillet 2009.

«Un film d'hauteur » assurait les affiches promotionnelles de Là-Haut : promesse tenue, ô combien ! Une preuve, s'il en fallait encore, de l'incontestable suprématie que le studio Pixar a acquise sur le genre animé de ce début de XXIème siècle.

En choisissant Carl Fredericksen, un vieillard veuf et antipathique, comme personnage principal de son nouveau film, Pixar poursuit son travail engagé depuis deux films autour des anti-héros repoussoirs et des figures mises aux bancs de notre société : après la rencontre avec Rémi, le rat gourmet de Ratatouille et Wall-E, robot romantique et esseulé, voici donc le spectateur flanqué d'un papi aigri et peu affable.

Carl Fredericksen vit reclus dans sa petite maison de banlieue, laquelle est grandement menacée de disparition par les projets immobiliers qui pullulent alentours. Un monsieur grincheux qu'on n'aurait franchement aucune raison d'aimer si une des scènes liminaires ne nous rappelait pas que ce vieillard qui n'intéresse plus personne fut jadis un jeune homme fringuant et bien mis de sa personne, un aventurier du quotidien passionné, amoureux, romantique. Ils avaient des rêves immenses, des espoirs incroyables. Oui, mais voilà, la vie s'est chargée de donner à Carl Fredericksen son âge et de le contraindre à remettre sans cesse à demain ce qu'il aurait dû engagé la veille.

A cet égard, une des scènes liminaires du film propose en deux minutes le panorama d'une existence, une rétrospective de la vie de Carl Fredericksen, de la rencontre amoureuse de son enfance jusqu'à la mort de sa bien aimée. Une aventure humaine croquée en quelque tableaux du quotidien, un morceau de bravoure qui justifie à lui seul qu'on se déplace dans les salles pour découvrir le film. De ces premières minutes, on ressort en effet ému aux larmes, étonné que l'animation ait atteint une telle maturité, qu'elle puisse enfin parler de l'Homme.

Suivent alors vingt belles minutes passées à explorer notre modernité à travers les yeux d'un homme hors-circuit. Le film décolle ensuite comme prévu et embraye sur d'immanquables péripéties et rencontres avec des personnages hauts en couleurs, en tête desquels un drôle d'oiseau et un chien parlant. Aventures et rebondissements qui séduiront d'abord les enfants.

Pourtant, le tour de force du film est de ne jamais céder à la tentation d'une narration trop prévisible et académique. Si l'on décolle dans Là-haut, c'est en effet pour très vite atterrir : comme dans Wall-E, le film part dans des directions inattendues, déjouant ainsi l'horizon d'attente du spectateur. Suprenante, la narration opère des ellipses et évacue plusieurs scènes d'action pour faire la part belle aux situations donnant à mieux connaître les personnages. Comme, s'il s'agissait de ne jamais sacrifier le vrai sujet du film. Le centre de l'attention, c'est bien ce grand-père grincheux qui semble incarner à lui seul toute l'audace de Là-haut, celle du contrepied. Ainsi le film célèbre-t-il l'aventure du quotidien et choisit-il de montrer les héros de l'enfance sous un jour peu flatteur, celui d'infâmes faux-culs pétris d'ambitions malsaines et de désirs de destruction. Une morale à la Capra en somme, pour un film d'une puissance émotive et d'une force distrayante rares.

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